Apocalypse Beach, roman

par Tanguy Lambert | Sommaire

Car & Motors

J’avais enfin réussi à laisser femme et enfants au 19ème étage de mon condominium près de l’ancien quartier français pour rechercher des trésors graphiques de l’Empire du Milieu, Shanghai est une escroquerie totale, deux cinés, une librairie censurée, et trois resto sympas, pas plus, un décors de carton pâte…

… le Disney Land d’une dictature industrielle pour touristes chinois et expats nigauds ou européens à plumer, mais dans ce néo moderne à haute densité de department stores, de buildings géants, d’embouteillage de vélos, et de police de surveillance, j’avais fini par dénicher la brocante en tout genre, un bâtiment simple peu éclairé, toit en tôle ondulé et une coursive à l’étage, un empilement de stands en mode capharnaüm et tout au fond, un bouquiniste et une pile d’affiches de propagande, ce que je pistais … je vais soigneusement en choisir trente, le vendeur me ramène le fond du stock… dont quelques classiques connus de Liu Chuanhua, ma collection est à Belleville pour les intimes…

Finalement, j’aimais bien la vie du gratte-ciel, les murs sont largement vitrés, on est toujours dans les nuages dérivants et les lumières changeantes, une capsule spatiale en route vers l’infini, au sunset la skyline est un spectacle futuriste, des roof tops bleu fluo ont des piscines… le 19ème étage c’est assez-bas quand même, la prochaine fois je demanderai le trentième. Le condo était fourni par une multinationale allemande, c’était ma période consultant on-est-pas-là-pour-rire, mais pour être numéro un mondial, tout le temps dans les avions… un truc pour moi quoi !… et des négociation serrées et très drôles avec les managers de Hambourg à qui j’enseignait l’art de jouer au poker business avec les chinois…

A Beijing, j’avais préféré l’hôtel des hommes d’affaire près de la cité interdire, établissement barbant à l’architecture soviétique, où chaque soir au bar t’es comme dans Lost in Translation, mais y’a jamais Scarlet qui débarque, ça risque pas, mais tu as quand même cette tranche de confort indispensable: tu vires en vrac ton sale à minuit devant ta porte et à six heure pétante, c’est tout beau tout bien repassé, livré avec le petit dej… et tu peux te sentir important en enfilant ta chemise blanche impeccable de top worker
J’allais au bureau en banlieue à 8h, en taxi climatisé, et je voyais mon équipe arriver à 8h30, après avoir fait une heure de vélo, grand sourire et en costard !!!! ça rigolait en bossant toute la journée et le soir c’était « Au revoir Monsieur et merci »… et bonjour le niveau technique, des filles et des mecs au top ! En rentrant à Paris, j’ai dis bougez-vous les mecs, vous aller prendre cher, très cher…

Cette peinture à l’huile de 1953 s’intitule: « Le grand programme de la construction navale », c’est déjà la lumière de l’aube dans la cabine du timonier au travail, il n’écrit pas, il respire, la calligraphie se fait avec l’énergie du ventre, la main ne bouge pas, c’est le souffle du tao qui dessine le chemin millénaire. Deux ans plutôt Mao avait créé les laodais, dix millions d’esclaves, un million de mort chaque année…